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Les salariés de la société Qualiduck à Maubourguet entament leur deuxième semaine de grève

mercredi 4 janvier 2017 par Rédaction

Les salariés de la société Qualiduck, à Maubourguet, spécialisée dans la découpe de canards sur chaîne industrielle, poursuivent leur mouvement de grève pour demander la réintégration d’un collègue licencié, l’amélioration des conditions de travail et de rémunération, et l’organisation d’élections de délégués du personnel. Ils ont reçu aujourd’hui le soutien d’autres salariés en grève, ceux de la Polyclinique de l’Ormeau-Pyrénées.

Un « froid de canard » règne sur la plaine de Maubourguet, cet après-midi du mardi 3 janvier 2017, comme un clin d’œil à la profession exercée par les personnes rassemblées en plein air devant le panneau « Montfort ». Les onze grévistes, sur 19 salariés, de la société Qualiduck, l’un des prestataires de service d’Euralis, sont des spécialistes de la découpe de canard sur une chaîne industrielle. Ils ont déclenché le 22 décembre 2016 un mouvement social, pour demander la réintégration d’un collègue licencié, selon eux, de manière abusive, et surtout pour réclamer de meilleures conditions de travail, une meilleure rémunération et l’organisation d’élections de délégués du personnel. Ce 3 janvier, les salariés de Qualiduck en grève, soutenus par la CGT, ont reçu un soutien inattendu : celui d’une vingtaine de grévistes de la Polyclinique de Tarbes. Une marque de solidarité qui réchauffe autant les ouvriers que le barbecue improvisé en plein air.

Ludovic, Jacinto, Willy, Carlo, Gilles, Anthony, Cédric, Nicolas, Mickaël, Kehzia et Danielle racontent leur quotidien sur la chaîne de travail de Qualiduck à Maubourguet, où ils procèdent chaque jour à la découpe complète de canards destinés à l’alimentation du grand public. « Les animaux arrivent déjà vidés et refroidis après un passage en climatisation. Ils sont posés sur un objet appelé « obus » en raison de sa forme, et défilent sur la chaîne automatisée de droite à gauche. Le rythme de travail est très élevé, il peut atteindre 3000 canards à l’heure. Une personne accroche les canards sur l’obus. Une deuxième personne déplume les magrets. Ensuite, deux autres collègues utilisent la technique de la « fourchette-brechet » pour séparer les magrets. Trois personnes découpent les magrets. Un collègue découpe les aiguillettes de canard et trois autres découpent les manchons. Enfin, trois personnes découpent les cuisses de canard. D’autres collègues sur la chaîne sont chargés de l’accrochage des canards la tête en bas, et deux salariés s’occupent du découpage des gésiers ». Les conditions de travail sont très difficiles, de l’aveu des salariés. Premier souci : l’absence de formation avant de démarrer sur la chaîne. « Les nouveaux ne sont formés ni à l’affûtage des couteaux, ni aux techniques de découpe. Ils doivent se contenter de regarder les autres travailler. Heureusement que nous sommes solidaires ». Les salariés sont en théorie trois par poste, et doivent changer d’activité dans la journée. Mais dans les faits, ils sont le plus souvent deux par poste, et comme les salariés polyvalents sont peu nombreux, la plupart du temps, les postes restent fixes. Cela a des conséquences sur la santé des personnes, avec les douleurs articulaires, par exemple. « Chaque poste a sa douleur spécifique ! ». Autre souci majeur selon les grévistes : la dégradation des conditions de rémunération. « Jusqu’en août 2016, nous étions payés à la tâche. Aux plus fortes périodes de production, les plus expérimentés d’entre nous pouvaient arriver à dégager des salaires compris entre 2500 et 3000 euros par mois ! Désormais, nous sommes payés à l’heure, et nous gagnons environ 1200 euros pour les plus anciens, et moins que le SMIC pour les plus jeunes ! Certaines personnes ont perdu jusqu’à 70% de revenus en quelques mois ». Faute de pointeuse, les heures supplémentaires ne sont jamais reconnues, et donc ni payées, ni récupérées. « En théorie, nous travaillons 151 heures par mois. Mais en novembre 2016, nous avons effectué 178 heures, sans aucune contrepartie financière pour cette hausse de rythme ». Les grévistes déplorent aussi les retards dans l’envoi des fiches de salaires. Enfin, ils regrettent l’absence d’élection de délégué du personnel dans la société depuis 2011.

Qualiduck, dont le siège social est situé à Aureilhan, mais dont l’activité se déroule à Maubourguet, est une société à responsabilité limitée. Elle a été reprise le 14 septembre 2009 par deux anciens salariés, Thierry Gabarra et Pierre Panissal. « Nous avons voulu dès le départ les rencontrer pour négocier, mais ils nous ont dit : ‘reprenez le travail, on en reparlera en 2017’. Nous avons changé d’année, et nous attendons toujours cette rencontre de négociation », soulignent les 11 salariés en grève. Ils réclament d’abord la réintégration de leur collègue Willy, licencié pour une raison qu’ils jugent abusive. Son contrat s’achève en principe le 29 janvier 2017. Ils demandent aussi la rédaction de fiches de postes et des formations pour les nouveaux arrivants. Ils réclament une base salariale plus élevée, pour compenser les pertes occasionnées par l’abandon de la rémunération à la tâche. Ils demandent aussi l’installation d’une pointeuse, pour contrôler les heures supplémentaires, et le paiement ou la récupération de ces heures de travail. Ils souhaitent aussi un planning indicatif pour poser les congés payés. Enfin, ils demandent l’organisation d’élections de délégués du personnel. « Notre grève se poursuivra tant que nous n’aurons pas obtenu de négociation sur nos revendications », assurent les 11 grévistes, soutenus par l’Union Départementale CGT et l’Union Locale de la CGT de Tarbes.

Leur détermination force l’admiration des grévistes de la Polyclinique de l’Ormeau-Pyrénées, venues les soutenir ce mardi 3 janvier 2017. « Nous avons voulu leur rendre visite, car leur lutte est juste, et elle mérite d’être entendue », explique Amélie. « Nous avons mesuré à quel point il était important de recevoir des soutiens extérieurs, pendant nos 57 jours de grève à la Polyclinique. Nous trouvons normal de venir les épauler à notre tour », ajoute Isabelle. « Nous avons découvert leurs conditions de travail, qui sont vraiment très dures. Ils travaillent toute la journée dans des températures de 4 degrés », souligne Martine. De leur côté, les salariées en grève de la Polyclinique de Tarbes espèrent que la rencontre présidée mardi soir par le Préfet de région à Toulouse « va ouvrir la voie d’une vraie négociation avec la direction ». En attendant, elles ont décidé de poursuivre leur mouvement social jusqu’à vendredi, en joignant leurs efforts à ceux d’autres salariés en lutte, comme ceux de Qualiduck à Maubourguet.

Jean-François Courtille

Lire le droit de réponse de Pierre Panissal, gérant la société Qualiduck