Séméac : Journées nationales de l’émigration aux Amériques

L’association ABAU a réuni une centaine de personnes le week-end dernier à Séméac pour évoquer les liens entre les Français partis en Amérique du Sud au XIXème siècle et leurs descendants restés dans l’hexagone. Invité d’honneur : Miguel Angel Estrella, le grand pianiste argentin, qui a donné un concert au Centre Albert Camus avec trois autres solistes sud-américains.

« Existencia porvenir » : la sculpture représente une femme à demi-nue et enceinte de trois mois. Réalisée par le plasticien Pedro Arieu, descendant d’un bigourdan parti en 1890 vers l’Argentine, elle symbolise les liens très forts qui unissent les habitants de Séméac et l’Amérique latine. « Nous avons créé en 2003 l’Association Bigorre, Argentine, Uruguay (ABAU), pour reprendre contact avec nos ancêtres partis dans ces pays au XIXème siècle », explique Jean-Paul Abadie, président de l’association.

« 25 000 Bigourdans ont émigré vers l’Amérique du Sud à partir des années 1850. Ils étaient souvent poussés par la misère, ou par le droit d’aînesse, qui empêchait les cadets de reprendre la ferme familiale », précise Monsieur Abadie. « Beaucoup de femmes sont parties aussi parce qu’elles attendaient un enfant hors mariage, ce qui n’était pas accepté par la société de l’époque. Enfin, certaines personnes des milieux économiques favorisés ont aussi fait le voyage, pour développer leurs affaires ».

L’association ABAU organise des voyages d’échanges avec les familles d’origines des émigrés bigourdans en Argentine et en Uruguay. Elle soutient aussi des projets pour aider les enfants et les jeunes sud-américains. Récemment, un don de 3000 euros a contribué à la création d’une salle multimédias et d’un studio d’enregistrement à San Miguel de Tucuman, en Argentine. Un projet monté en lien avec « Musique pour l’espérance », l’association fondée par le grand pianiste argentin Miguel Angel Estrella.

L’artiste est d’ailleurs venu le week-end dernier à Séméac, où il a présenté un concert au Centre Albert Camus, avec trois autres solistes latino-américains de grand talent : le queniste Raul Mercado, le guitariste Omar Espinosa et le percussionniste Javier Estrella. « Nous recevons très souvent la visite de personnes venues d’Argentine, grâce à l’association ABAU », se réjouit Geneviève Isson, maire de Séméac. « Cette association, constituée par des passionnés de généalogie, a aidé les habitants de la ville à reprendre contact avec une partie de leurs familles. Nous sommes heureux d’avoir pu accueillir ces troisièmes journées nationales, auxquelles ont participé plusieurs autres associations du Sud-Ouest ».

Les invités d’ABAU et de la ville de Séméac ont effectué un périple de découverte des beautés de la Bigorre, avec notamment la visite du jardin Massey, du château de Mauvezin et de l’abbaye de l’Escaladieu. Sans oublier la photo du souvenir devant la sculpture de Pedro Arieu. Jean-Paul Abadie, le président de l’association, insiste sur l’importance de transmettre l’histoire de l’émigration aux jeunes générations bigourdanes. Il vient d’ailleurs de publier, aux éditions du Cairn, un ouvrage de textes et de photos historiques, « Les Hautes-Pyrénées de mes grands-parents ».

Pendant un week-end, les distances entre la Bigorre et la lointaine Amérique latine ont été abolies. Une manière d’accomplir le rêve de ces audacieux voyageurs, qui partaient à l’aventure pour découvrir « l’existence de l’avenir ».

Jean-François Courtille