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La clinique de l’Ormeau-Centre bloquée pendant la journée de mercredi par les salariés en grève, la direction déboutée de sa demande concernant les 17 salariés assignés, la Préfète organise une rencontre entre les deux parties jeudi matin

mercredi 14 décembre 2016 par Rédaction

Les grévistes de la Polyclinique de l’Ormeau-Pyrénées, avec l’appui de la CGT, ont bloqué comme ils l’avaient annoncé, toute la journée de mercredi, le site de l’Ormeau-Centre, laissant passer les ambulances, ainsi que les patients et le personnel des services d’oncologie. Le tribunal de Tarbes a débouté la direction de l’établissement de sa demande à l’encontre des 17 salariés assignés mardi devant le juge des référés. La Préfète des Hautes-Pyrénées a annoncé lors d’une conférence de presse avoir proposé une rencontre jeudi matin entre la direction, les salariés en grève et la CGT. Elle a aussi saisi l’Agence Régionale de Santé.

Deux petits chapiteaux rouges sont dressés devant l’entrée de la clinique de l’Ormeau-Centre, alors qu’un soleil timide émerge à l’horizon, ce matin du 14 décembre 2016. A proximité, quatre militants de la CGT installent la plancha en prévision du déjeuner. La rue est coupée à chaque extrémité par des barrages filtrants de salariées en grève, emmitouflées dans leurs vêtements d’hiver, un gilet fluo enfilé par-dessus. Les accès à la villa administrative sont aussi bloqués. Au milieu de la rue, un chapelet de pneus renforce le barrage. La scène est observée par des policiers placides, qui s’assurent que les automobilistes ne forcent pas les barrages. De temps à autres, les grévistes et leurs soutiens laissent passer une ambulance, qui se faufile jusqu’à l’entrée des urgences. « Nous avons organisé un blocage total de l’établissement, sauf pour les personnels non-grévistes et les médecins des services de radiothérapie et de chimiothérapie, ainsi que les patients qui souhaitent accéder à ces services », précisent deux infirmières grévistes, Véronique et Rachel. « Nous essayons de faire un peu plus de bruit pour que la direction nous entende. Hier soir, nous avons distribué des tracts aux personnes de passage. Nous avons rassuré les patients hospitalisés, en leur expliquant qu’ils pouvaient sans problème quitter les lieux après leur période d’hospitalisation. Nous avons dit la même chose aux médecins, qui peuvent continuer à opérer ». Les deux infirmières sont satisfaites de constater que la grève ne s’essouffle toujours pas, après 37 jours de mobilisation. « Nous avons remarqué aussi que beaucoup de collègues non-grévistes sont venues nous soutenir au tribunal. Elles ont souligné le côté pacifique de notre mouvement ». Rachel porte dans ses bras une petite caisse pour collecter les dons des passants. « Les gens continuent à nous aider. Cela nous réconforte, car après plus de cinq semaines et à dix jours de Noël, nous en avons bien besoin ».

Christian, retraité, fait partie des personnes qui sont venues renforcer le blocus ce mercredi matin. « Leurs revendications sont totalement légitimes. Il faut améliorer considérablement leurs conditions de travail et augmenter leurs salaires. Et d’une manière générale, défendre avec elles le système de santé. A titre personnel, je suis favorable à ce que ces « monstres privés », les cliniques, rejoignent le secteur public ». José Navarro, l’un des responsables de l’UD CGT associés aux délégations lors des négociations, assure que le premier ministre Bernard Cazeneuve suit attentivement le dossier de la Polyclinique. Une information transmise selon lui par un parlementaire. Sur l’un des barrages filtrants, Annick et Sandrine, deux préparatrices en pharmacie, confient les difficultés rencontrées dans leur activité. « Depuis le début du mouvement, nous sommes quatre préparatrices en grève ». Salariées de la Polyclinique, elles ont plusieurs missions. La traçabilité des Dispositifs Médicaux Implantables. Le réapprovisionnement en matériel et en médicaments du bloc opératoire et des services. La préparation des chimiothérapies et des prescriptions. « Depuis que Médipôle Partenaires a racheté la Polyclinique, nous ne sommes plus que des « exécutantes ». Les nouvelles méthodes de management font que nous ne sommes plus associées aux projets », déplorent les deux jeunes femmes. « Notre charge de travail est plus importante. Aux dernières vacances de la Toussaint, trois de nos collègues n’ont pas été remplacées. La secrétaire du bloc « DDMI » n’a pas non plus été remplacée, l’une d’entre nous a dû la suppléer. Nos responsables subissent une pression importante de leur hiérarchie. Nous sommes parfois confrontées à des aberrations. Par exemple, on va nous demander de délaisser la préparation des traitements destinés aux patients, pour nous consacrer en priorité à remplir les étagères des services ».

En milieu de matinée, une bonne nouvelle parvient aux grévistes, en provenance du tribunal de Tarbes. Le juge des référés a rendu son ordonnance. Elle est favorable aux 17 salariés de la Polyclinique. « La situation doit être appréciée au moment où le juge est appelé à statuer. Or, le jour de l’audience, les parties ont convenu que les lieux avaient été libérés. La société Polyclinique n’ayant pas de trouble manifestement illicite distinct de celui de l’occupation permanente des locaux, elle n’apporte aucun élément en soutien de l’allégation selon laquelle une nouvelle occupation de la clinique serait envisagée. Elle doit donc être déboutée de sa demande, qui n’est plus d’actualité, dès lors qu’aucun salarié gréviste n’occupe les lieux à ce jour. Dans l’hypothèse où de nouveaux faits d’occupation se reproduiraient, il appartiendrait à la société Polyclinique de saisir en ce sens à nouveau le juge, en vue de les faire constater, quand bien même de tels faits serait discontinus ». Du côté de la direction, on en déduit que « l’assignation était donc bien nécessaire. Le juge n’a pas statué sur le fait que l’occupation était ou non illégale, mais sur le constat que le trouble manifestement illicite n’était plus établi, car l’occupation avait cessé. Au demeurant, le blocus constitue un simple filtrage, et l’ensemble des consultations reste accessible. La clinique poursuit donc son activité, dans le respect du droit de grève ». Les salariés grévistes, eux, se réjouissent que la direction ait été déboutée de sa demande, soulageant les 17 personnes assignées du poids qui pesait sur leurs épaules.

Dans l’après-midi de mercredi, les médecins de la Polyclinique de l’Ormeau, via la CME, publient un nouveau communiqué dans lequel ils « tiennent de nouveau à alerter du risque sanitaire majeur désormais encouru par la population des Hautes-Pyrénées, car tous les habitants sont des malades potentiels, dont personne ne semble se préoccuper ». Les médecins jugent cette situation inacceptable.  « Elle ne peut durer sans avoir des conséquences terribles et dramatiques aussi bien pour les malades que pour l’ensemble de la population. Aucun conflit social ne doit mettre en jeu la vie des personnes. Des solutions doivent être trouvées pour sortir de la crise ou permettre que le conflit se poursuive sans blocage des soins ». Les praticiens appellent donc à « la responsabilité de chacun – direction, personnel gréviste, ARS, préfecture – pour que des solutions concrètes soient immédiatement trouvées, afin de permettre une prise en charge des patients et le maintien effectif du droit d’accès au soin ».

En fin d’après-midi, la Préfète des Hautes-Pyrénées, Béatrice Lagarde, organise une conférence de presse pour faire le point sur la situation de la Polyclinique de Tarbes. « J’ai noté le blocage de la clinique organisé par les grévistes, qui s’est déroulé comme ils l’avaient annoncé. Pour ma part, je n’ai qu’un seul objectif : jouer les interfaces pour que la direction et les grévistes se retrouvent, afin de reprendre les discussions. Jeudi matin, à 11h, nous organisons une rencontre à la préfecture, sous la présidence de Marc Zarrouati. Nous invitons tout le monde : direction de la clinique, dans ses composantes locales, régionales et nationales, et puis les grévistes, l’UD CGT et le responsable régional de la CGT Santé et Action Sociale. Avant d’en arriver à des solutions plus contraignantes de régulation de l’ordre public, via les forces mobiles, il faut d’abord tout tenter pour parvenir à des négociations et à des discussions ». La Préfète a confié qu’elle a « saisi mercredi l’Agence Régionale de Santé pour demander quelles mesures avaient été prises dans la perspective de ce blocage annoncé depuis plusieurs jours, et quel plan était envisagé dans le cas où la crise se prolongerait ». Elle précise ne pas avoir eu de contact avec les services du Premier Ministre, mais avec les ministères de la santé et celui du travail. « Ces ministères estiment que c’est un conflit privé du travail. Nous déclinons cette position en proposant jeudi cette nouvelle rencontre ». Béatrice Lagarde, qui a avoué « répugner à recourir à la force publique », a expliqué que seule, l’exécution d’une décision de justice pourrait l’amener à y recourir. « Démocratiquement, je trouve qu’il est plus intéressant d’appliquer mon obligation de moyens : faire en sorte que ces gens se rencontrent, se parlent et négocient ».

La journée du 16 décembre, la 38ème de la grève à la Polyclinique de l’Ormeau-Pyrénées, devrait donc être marquée par trois moments forts. D’abord, la poursuite du blocage de l’Ormeau-Centre avec des barrages filtrants. Ensuite, la rencontre proposée par la préfecture, sous réserves de l’accord des parties en présence. Et enfin, la présentation d’une motion de soutien aux grévistes lors du Conseil communautaire du Grand Tarbes.

Jean-François Courtille

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