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Polyclinique : visite de Philippe Martinez samedi, les salariés attendent un protocole de fin de conflit de la direction, une confrontation a eu lieu avec le Maire

vendredi 6 janvier 2017 par Rédaction

Le mouvement social de la Polyclinique de l’Ormeau-Pyrénées se poursuit, après 60 jours de grève. Les salariés attendent samedi la visite du secrétaire général de la CGT Philippe Martinez. Un protocole écrit de fin de conflit devrait leur être transmis par la direction et mis en discussion par l’assemblée générale samedi après-midi à la Bourse du Travail. Vendredi soir, les salariés en grève ont envahi le hall de la Mairie de Tarbes, et ont interpellé Gérard Trémège à propos de son discours sur le mouvement social lors de ses vœux à la population tarbaise. Une infirmière en grève a lu au Maire une lettre de réaction à ses propos publics.

« Nous attendons d’avoir sous les yeux un protocole écrit de fin de conflit de la direction de la Polyclinique, sur la base des propositions formulées cette semaine par le Préfet de la région Occitanie, qui avaient été approuvées par les salariés en assemblée générale. Ces propositions étaient les suivantes : application de la Rémunération Annuelle Garantie (RAG) à 8,33 à compter du 1er janvier 2016, avec effet rétroactif ; prime de 500 euros bruts en 2016 ; et instauration à compter de 2017 d’une prime annuelle pérenne de 800 euros bruts ». Laurence Charroy, déléguée CGT de la Polyclinique de Tarbes résume ainsi la position de ses collègues, en grève depuis 60 jours ce vendredi 6 janvier 2017. Ils attendent de la part de la direction un « protocole écrit de fin de conflit en bonne et due forme », qui doit être discuté entre les salariés grévistes à la Bourse du Travail samedi après-midi, en présence de Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT et de Mireille Stivala, secrétaire générale de la Fédération CGT Santé et Action sociale.

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Lors de la conférence de presse qui suit l’AG de ce vendredi après-midi, les salariées grévistes et la CGT dénoncent « les manœuvres de la direction pour tenter d’accréditer l’idée que les problèmes sont réglés, et que son acceptation tardive des recommandations du médiateur suffit à faire cesser la grève ». Fatima, l’une des infirmières de la délégation des grévistes, souligne à ce sujet que « les plannings concernant la dissociation des services d’Hospitalisation de semaine et de chirurgie conventionnelle ne nous ont toujours pas été transmis. Pour l’instant, nous n’avons que des paroles ». Les grévistes et la CGT ont été choqués par le dispositif policier mis en place pour les dissuader d’entrer au siège opérationnel de Médipôle Partenaires, à Bordeaux, puis pour bloquer leur car à la clinique Saint-Martin de Pessac. Ils ont été encore plus choqués par les propos de Gérard Trémège à leur encontre, lors de la cérémonie des vœux à la population tarbaise jeudi soir. « Un référendum d’entreprise est illégal en temps de grève, tout simplement parce que les contrats des grévistes étant suspendus, seuls les salariés non-grévistes pourraient y participer », explique Christophe Coudert, coordinateur régional de la CGT Santé et Action sociale. « Cela démontre une méconnaissance du droit du travail de la part du Maire de Tarbes ». Le coordinateur cite « de nombreuses délits d’entrave au sein de la Polyclinique l’année dernière, comme la non-consultation du CHSCT ou la non-consultation du Comité d’entreprise ». Laurence Charroy évoque aussi la quinzaine de « non-grévistes » qui ont tenté de s’inviter lors de l’assemblée générale du vendredi après-midi à la Bourse du Travail, parfois avec agressivité. Les salariées reprochent à Gérard Trémège de vouloir « leur faire porter le chapeau de la situation sanitaire ». Pour Aurélie, une autre infirmière de la délégation, « la direction de la Polyclinique est la seule responsable de ce gâchis. Un mal-être profond s’est installé au fil des mois dans les services, depuis le rachat de l’établissement par Médipôle Partenaires. S’ils avaient entendu ce mal-être, jamais le mouvement social ne se serait déclenché ».

Une délégation de 80 salariés, avec leurs soutiens, envahit vendredi en début de soirée le hall de la Mairie de Tarbes, pour réclamer une entrevue avec Gérard Trémège. Le Maire arrive, accueilli par des huées. Il entame le dialogue avec les manifestants, dans une atmosphère tendue. « Je me soucie des dizaines de personnes en attente de soin. Certaines ont dû être réorientées vers d’autres établissements ». Les grévistes scandent : « adressez-vous à Médipôle Partenaires ». Gérard Trémège reprend : « je comprends les revendications légitimes du personnel, notamment pour les conditions de travail. Mais j’ai demandé l’organisation d’un référendum à la direction de l’entreprise, au nom de la démocratie. Est-ce choquant ? ». Dans la foule, une personne lance : « vous avez été mis trois fois en examen et vous venez nous faire la morale ! ». Une gréviste empoigne le micro tendu par le Maire et lui répond : « nous ne sommes pas dans une démocratie au sein de cette entreprise. Nous avons affaire à un trust. Nous voulons sortir de ce conflit par le haut. Et nous avons besoin pour cela du soutien que vous nous aviez promis. Mais vous avez retourné votre veste ». L’un des soutiens des grévistes ajoute : « la négociation bloque sur 80 000 euros, alors que l’entreprise va faire 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Ils le savent très bien que 1620 interventions ont dû être reportées. Mais ils se moquent de la santé publique ».

Puis, Karine, une infirmière en grève s’approche. Elle souhaite lire au Maire une lettre dans laquelle elle exprime son « ressenti après votre discours lors des vœux, et notamment concernant les grévistes de la clinique de l’Ormeau, manipulés selon vous par la CGT. Cela laisse songeur. Lorsqu’un agriculteur manifeste, personne ne dit qu’il est manipulé par la FNSEA. Ces propos sont méprisants vis à vis des femmes que nous sommes puisqu’on nous enlève même notre capacité de réflexion. Monsieur le Maire, lorsqu’il y a un conflit, ce sont les syndicats qui négocient. Pourquoi en serait-il autrement à Tarbes ? La CGT est le seul syndicat présent sur l’Ormeau, c’est donc vers elle que ce sont tournés les salariés. Depuis le début du conflit, des palabres ici et là, évoquent la composition de notre délégation. Tout le monde souhaiterait que nous, soignantes, soyons représentées sans syndicats, ce qui revient à nous présenter autour de la table pour nous faire "bouffer toutes crues" par ce monstre de la finance. Nous avons été majoritairement présentes en délégation lorsqu’il y a fallu défendre nos conditions de travail. En revanche lorsque les négociations ont porté sur les salaires - pour mémoire lorsque le préfet de région évoquait sur les conseils du médiateur de la République une prime annuelle de 800 euros, la Direction en proposait 200 - on nous a imposé seulement 4 représentants ».

Et la jeune femme précise sa pensée concernant l’utilité de l’intervention du syndicat dans cette négociation. « Aucune d’entre nous ne passe ses soirées à potasser le Code du travail et à engloutir des grilles d’indice, de points, de coefficients etc ... Je sais juste que je gagne entre 200 euros et 400 euros par mois de moins que mes collègues du privé/public confondus, à ancienneté et diplôme égal. Et cela, ce n’est pas la CGT qui me l’a appris. Il faut savoir reconnaître ses limites et passer le relais. Nous sommes des soignants et non des habitués des tables de négociation. Pour la majorité d’entre nous, c’est notre première grève. Un avocat aide son client et tout le monde est d’accord. Un syndicat soutient des soignants et cela pose problème. Quel mépris ! Un acteur de la santé en libéral aurait même dit : "pourquoi sont-elles allées à Toulouse, elles devraient plutôt faire des crêpes pour rallier la population à leur cause". Des femmes dénuées de réflexion propre qui ont leur place derrière les fourneaux ! Et ils sont nombreux à accuser les grévistes à coup d’intox médiatique, sans se demander ce qui a poussé ces mères et ces grand-mères non syndiquées, n’ayant jamais fait grève auparavant, dans la rue depuis 2 mois, dans le froid et en période de fêtes. Notre amour du métier, nos conditions de travail, notre dignité et notre employeur, Monsieur le Maire, voilà ce qui nous a poussées à faire la grève, pas la CGT ! Ne prenez pas le problème par la fin mais par le début, ne faites pas de raccourci, c’est trop facile. Ayez plus de respect pour les soignants. Et soyez rassuré, chacun reprend le travail lorsqu’il le souhaite, ce n’est pas la CGT qui nous dicte ce que l’on doit faire : ce sont les salariés en Assemblée Générale et seulement eux qui décident. Ne vous en déplaise, nous pensons et nous réfléchissons ». L’infirmière en grève conclut par cette réflexion : « nous sommes des femmes, et c’est pour cela que nous sommes méprisées ! ». Gérard Trémège accepte alors de présenter ses regrets au personnel de la Polyclinique que ses propos auraient pu blesser. Il ajoute néanmoins : « si cela a blessé des organisations syndicales, tant pis pour elles ». Le Maire réfute ensuite un reproche de plusieurs grévistes concernant l’aide apportée par les services sociaux de la commune. « Toutes les demandes formulées par écrit ont été prises en compte, comme celle concernant les crèches ». Les manifestants quittent l’Hôtel de Ville à la fin de cet entretien houleux, dont le principal mérite aura été de crever les abcès.

Dans un article publié jeudi, le site d’investigation Médiapart cite un communiqué de presse du groupe Médipôle Partenaires, propriétaire de la Polyclinique de l’Ormeau-Pyrénées, publié en 2016. Dans ce communiqué, le groupe précisait que pour le premier semestre 2016, son « chiffre d’affaires s’inscrit en hausse de 4%, à 460,4 millions d’euros ». Le groupe évoque aussi « une introduction en bourse sur Euronext Paris ». Les murs de la clinique de l’Ormeau Centre dévoilent une affichette qui porte un message adressé par les salariés en grève au PDG du groupe Médipôle Partenaires, comme un résumé de leur mouvement social : « Gravier, notre fierté n’est pas négociable ».

Jean-François Courtille

Diaporama - Photos JF Courtille