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Polyclinique : rencontre entre cinq élus du Département et les salariés en grève, l’ARS de Montpellier toujours occupée par les grévistes

mercredi 28 décembre 2016 par Rédaction

70 salariés en grève de la Polyclinique de Tarbes, avec leurs soutiens, ont rencontré ce mercredi à l’Hôtel du Département cinq élus pour demander leur intervention dans le conflit social qui les oppose depuis 51 jours à la direction de leur établissement. 70 autres grévistes et leurs soutiens occupent toujours le siège de l’Agence Régionale de Santé à Montpellier. La directrice de l’ARS, avec l’appui du président des Hautes-Pyrénées, essaie d’organiser une rencontre à Paris entre les protagonistes du mouvement social et des représentants du Ministère de la Santé et du Ministère du Travail. 

La salle de délibérations de l’Hôtel du Département, à Tarbes, est devenue depuis quelques semaines l’un des points de ralliement des grévistes de l’Ormeau-Pyrénées. Ce mercredi 28 décembre, en fin de matinée, le directeur adjoint des services du Département, Pascal Saurel, et l’un des agents polyalents, de permanence sur le site pendant les congés scolaires, accueillent 70 salariés de la Polyclinique de Tarbes, avec leurs soutiens. Les manifestants réclament une nouvelle rencontre avec le président Michel Pélieu, indisponible car souffrant. Les grévistes demandent alors à rencontrer des conseillers départementaux. En début d’après-midi, Virginie Siani-Wembou, vice-présidente du Département, arrive sur le site, accompagnée par Jean Buron, Andrée Souquet, Gilles Craspay et Andrée Doubrère. Un long échange se déroule alors entre les salariés en grève et les élus.

« Je dois excuser le président Michel Pélieu qui est souffrant. Il m’a chargée de vous rencontrer, avec les autres élus disponibles », commence Virginie Siani-Wembou. « Michel Pélieu est en lien téléphonique régulier avec la directrice régionale de l’ARS, Monique Cavalier. Il a aussi des contacts avec les cabinets des ministères de la santé et du travail. Il a sollicité plusieurs médias nationaux comme BFM TV ou Médiapart. Le président Pélieu aide actuellement la directrice de l’ARS à essayer d’organiser une rencontre, à Paris, entre les représentants des deux ministères, une délégation de grévistes, la CGT et le groupe Médipôle Partenaires. Il propose aussi de participer à cette rencontre par visioconférence ».

Virginie Siani-Wembou enchaîne ensuite en demandant aux salariés en grève de lui présenter un état de la médiation en cours avec la direction de la Polyclinique. « J’ai compris que la direction avait accepté vos demandes concernant les conditions de travail, mais qu’elle avait rejeté l’attribution d’une prime pérenne de 700 euros, préconisée par le médiateur Pierre Martin ». Laurence, l’une des salariées en grève, précise alors : « au niveau des conditions de travail, en réalité, nous avons juste préservé nos acquis, mais nous n’avons rien obtenu de nouveau, après 51 jours de grève ! Et les salaires vont rester très bas. 80 filles sont montées à Montpellier pour rencontrer l’ARS. Nous ne comprenons pas pourquoi les cabinets ministériels tardent tellement à débloquer la situation. Faut-il attendre que l’une des filles se suicide pour voir enfin les ministères bouger ? ». Virginie Siani-Wembou reprend la parole, en sa qualité de médecin et de responsable de service à l’Hôpital de Tarbes, associant à sa réflexion Andrée Doubrère, qui a travaillé 41 ans dans le même centre hospitalier, pour demander aux grévistes de détailler ce qui pose problème dans le domaine des conditions de travail à la Polyclinique.

Isabelle, l’une des aides-soignantes de la délégation, résume les différents points touchant à ces conditions de travail. « Nous avons dû batailler contre des changements que la direction voulait nous imposer : sur les repas du midi, les amplitudes horaires, le travail de nuit, les suppressions de postes au bloc obstétrical ou aux Urgences, la répartition des Agents de Service Hospitalier entre plusieurs services, ou encore le remplacement de l’agent d’accueil à l’Ormeau-Centre par un simple écran de contrôle renvoyant au standard de l’Ormeau-Pyrénées. Nous contestions aussi la mutualisation des trois services Hospitalisation 1, Hospitalisation 2 et chirurgie conventionnelle ». Dominique, aide-soignante en cardiologie, évoque ensuite la suppression de son service « Cardio 4 » : « nous ignorons où nous devons travailler, d’un jour à l’autre. Et personne de notre service ne le sait. Au dernier moment, on nous affecte sur un poste où il y’a un surcroît ponctuel d’activité. Des filles arrivent sur l’Ormeau-Centre et on leur dit d’aller travailler ce jour-là sur l’Ormeau-Pyrénées. Pour la direction, la politique du « lit vide » est impensable, il faut remplir à tout prix. Je suis en fin de carrière et je n’ai jamais vu cela, même à Paris ! ». Isabelle souligne alors que la direction, après les négociations, a accepté que les filles de Cardio 4 puissent « avoir un planning prévisionnel sur trois mois. Et pour celles qui n’auront pas ce prévisionnel, elles toucheront une prime de « pool » d’un montant de 80 euros bruts par mois ».

Fatima, une infirmière de la délégation, précise alors que « le gros point d’achoppement sur les conditions de travail reste notre demande de dissociation des services HD1, HD2 et chirurgie conventionnelle. Mais dans le courrier qu’elle a adressé aux salariés, la direction évoque la période probatoire de trois mois, ce qui signifie qu’elle n’a pas vraiment cédé sur ce point. Par ailleurs, quand la direction parle du RAG à 8,33 comme de l’équivalent d’un 13ème mois, c’est inexact. Ce RAG va se monter en réalité à une somme aux alentours de 250 euros ! ». Une autre gréviste, qui travaille depuis 34 ans aux admissions, relate la « grande souffrance des salariés. Cet été, on a supprimé deux équivalents temps plein dans notre service. Les patients qui doivent régler 11 euros pour leurs frais de dossier attendaient parfois des heures, faute d’effectif suffisant pour les accueillir. C’était très dur à vivre. Notre santé, en fin de compte, personne ne s’en préoccupe ! Nous sommes méprisées. Par contre, on sait très bien nous mettre la pression pour essayer de proposer aux patients des chambres individuelles à 70 euros. ». Touchée par ce témoignage, Virginie Siani-Wembou assure : « dans un service, la personne qui travaille, par exemple, au laboratoire, a autant d’importance que le médecin. Nous sommes tous les maillons d’une même chaîne, et chaque maillon est indispensable ».

Fatima reprend le micro pour relater la dégradation de la situation sanitaire dans le département, avec un impact sur la région. « Nous avons des échos de l’hôpital de Purpan, à Toulouse, qui commence à déborder. Ce qui nous interpelle aujourd’hui, c’est que l’Etat semble « en faillite » face aux groupes financiers. Nous ne voulons pas que la santé publique dépende d’intérêts privés. Quel est votre pouvoir pour interpeller ces groupes financiers ? Il y’a urgence, car la colère commence aussi à gagner les patients. Lundi, nous avons mis en place un barrage filtrant tout ce qu’il y’avait de plus léger devant la clinique de l’Ormeau-Centre. Un monsieur en voiture a foncé, il a failli écraser des enfants qui jouaient à proximité. Faudra-t-il attendre un drame pour que les choses bougent enfin ? Nous demandons au Ministère d’anticiper ce qui va se passer en janvier 2017, car nous sommes déjà dans une situation catastrophique ».

Les cinq élus présents rappellent alors aux salariés en grève qu’ils n’ont pas d’autre pouvoir que de peser sur les parlementaires, ou d’informer les médias sur cette situation. Mais ils s’engagent à tenir au courant le président Pélieu de leurs échanges avec les grévistes de l’Ormeau. De son côté, Virginie Siani-Wembou confie que les politiques « se heurtent aussi, dans leur activité quotidienne, aux barrages établis par des technocrates. Il faut sans cesse batailler pour nous faire entendre ». Elle évoque aussi les difficultés rencontrées par l’hôpital public, citant l’exemple des « 10 postes supprimés en 2016 au Centre hospitalier de Tarbes », et l’absurdité de certaines préconisations. « Comme chef de service, on m’a proposé de remplacer un poste de laborantin par un poste de plombier ! J’ai bondi ! ». Viviane, une responsable régionale de la CGT Action Sociale et Santé, aborde la question des enjeux financiers du regroupement entre Médipôle Partenaires et Elsan. « Ce projet de fusion prime sur toute considération de santé publique et d’humanité. Nous prenons nos responsabilités, et nous allons appeler tous les représentants syndicaux à voter contre cette fusion, au sein du Comité d’entreprise de Médipôle ». Joëlle, psychologue, demande ensuite aux élus de « faciliter l’accueil des salariés en grève par les services sociaux du Département, car ils sont dans une situation financière difficile ».

L’échange s’achève. Les salariés en grève se retrouvent à huis-clos pour une assemblée générale, en « duplex téléphonique » avec leurs collègues à l’ARS de Montpellier. Pendant ce temps, les cinq élus contactent Michel Pélieu par téléphone. Puis, Virginie Siani-Wembou revient dans la salle de délibérations, pour annoncer les décisions prises avec le président des Hautes-Pyrénées. « Monsieur Pélieu était au téléphone avec le médiateur juste avant notre appel. Il continue à appuyer auprès de la directrice régionale de l’ARS l’organisation de la rencontre avec les ministères à Paris. Il s’est engagé à réunir en début de semaine prochaine les parlementaires des Hautes-Pyrénées, pour étudier une nouvelle action commune. Enfin, il va donner consigne aux services sociaux du Département de réserver un bon accueil aux grévistes de l’Ormeau-Pyrénées, notamment pour le règlement des factures de gaz et d’électricité auprès de leurs fournisseurs ». Des annonces applaudies par les salariés en grève et leurs soutiens. Après le départ des élus, ils se réunissent pour partager un repas, acheminé gracieusement par les services de la Mairie de Tarbes. Pendant ce temps, à Montpellier, leurs 70 collègues s’apprêtent à passer une nouvelle nuit au siège de l’Agence Régionale de Santé …

Jean-François Courtille

Diaporama - Photos JF Courtille