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Le supermarché Leclerc Ormeau de Tarbes transformé en terrain de jeu par les opposants au travail du dimanche

lundi 28 novembre 2016 par Rédaction

Pour dénoncer la première ouverture dominicale du supermarché Leclerc Ormeau à Tarbes, ce dimanche 27 novembre 2016, une cinquantaine de militants de Nuit Debout, de la coordination climat 65 COP 21, d’ATTAC et de la CGT ont organisé une matinée de sensibilisation du public. Plusieurs militants ont improvisé un terrain de jeu à l’intérieur de la grande surface. Des tracts ont été distribués aux clients, des affiches et des cartons d’information ont été apposés à l’entrée du magasin. Les élus CGT du CHSCT de l’Ormeau Leclerc se sont aussi rendus sur place. Le supermarché a été ouvert grâce à l’embauche d’étudiants. Le directeur des magasins Leclerc de Tarbes Ormeau et de Lourdes présente cette ouverture comme un test pour s’adapter aux nouvelles habitudes de consommation de la clientèle.

« C’est aujourd’hui dimanche, les cinémas sont pleins. Les oiseaux sur les branches regardent les humains ». Cet extrait d’un poème de Jacques Prévert accueille la clientèle du supermarché Leclerc dans le quartier de l’Ormeau à Tarbes, ce dimanche 27 novembre 2016, pour dénoncer la première ouverture dominicale du magasin. Une cinquantaine de militants de Nuit Debout, de la coordination climat 65 COP 21, d’ATTAC et de la CGT sont rassemblés devant le magasin, pour sensibiliser le public aux conséquences de cette ouverture sur les salariés permanents de Leclerc, sur les étudiants, et d’une manière générale, sur la vie de notre société. En milieu de matinée, plusieurs manifestants, revêtus de tee-shirts « Nuit Debout » et « Action Non Violente COP » entrent dans un joyeux désordre à l’intérieur du magasin, pour y improviser un terrain de jeu au milieu des allées, devant les clients surpris et le directeur consterné. « Le dimanche, c’est pour jouer, c’est pas fait pour travailler », chante Morgane, une jeune femme rieuse, glissant sur une trottinette, déguisée en petite fille. Une manifestante habillée en costume de licorne entame une partie de badminton avec une autre personne, tandis que deux dames s’installent près d’une tête de gondole pour démarrer une partie de cartes. Une autre jeune femme arbore une pancarte avec ces mots : « le dimanche au musée, pas au supermarché ». Certains clients passent leur chemin, un peu gênés. Un couple énervé apostrophe la jeune femme en trottinette : « profitez-en, dans six mois, cela ne sera plus pareil ! ». D’autres clients prennent le temps de dialoguer avec les manifestants. Brice Saint-Laurent, le directeur des magasins Leclerc de Tarbes-Ormeau et de Lourdes, observe la scène en silence. Marine, une étudiante, discute avec deux des manifestants. « C’est mon choix de venir travailler ici le samedi et le dimanche. Je n’en ai pas besoin financièrement, car je vis chez mes parents. Mais j’ai pris ce travail pour acquérir mon indépendance ». Elle assure que c’est le cas de la plupart des étudiants embauchés au Leclerc Ormeau.

A l’entrée de la grande surface, Muriel, l’une des salariées permanentes de la grande surface, distribue des tracts au public en arborant une affiche avec un dessin humoristique et le message suivant : « défendre le repos hebdomadaire, c’est l’affaire de tous ». Elle explique son action. « Nous voulons sensibiliser la clientèle aux conséquences de l’ouverture du dimanche matin. Les gens peuvent venir faire leurs courses du lundi au samedi. Aujourd’hui, le supermarché est ouvert grâce à l’embauche des étudiants. Mais demain, les salariés permanents qui signeront des contrats de travail devront désormais aussi venir travailler le dimanche. Et quand les étudiants seront malades, nous serons obligés de venir les remplacer ! ». Yves, délégué de la CGT au CHSCT, relate ce qu’il a observé ce dimanche matin, à l’ouverture du magasin. « Les étudiants n’ont pu réaliser que le « facing », c’est-à-dire l’avancement des rayons. Cela signifie que les collègues qui arriveront lundi matin auront un surcroît de travail, alors qu’ils ont déjà du mal à tout installer dans les délais. Il faut dire que les étudiants ont été formés en trois semaines pour la mise en rayons et en un mois pour les caisses, ce qui est insuffisant ». Joëlle, une autre élue de la CGT au CHSCT, dénonce « une entrave à mon mandat d’élue au CHST, quand je me suis présentée ce dimanche matin à 8h30. Je n’ai pu entrer qu’en me faufilant à l’arrivée du vigile ». Elle rappelle que l’expertise demandée au printemps par le CHSCT du Leclerc Ormeau avait pointé de nombreuses anomalies dans le projet d’ouverture dominicale de la grande surface. Un avis dont la direction n’a pas souhaité tenir compte.

Plusieurs collègues de Joëlle distribuent des tracts aux personnes de passage. Une jeune femme tente d’expliquer à l’une des nombreuses personnes âgées qui viennent faire leurs courses quelles conséquences va entraîner l’ouverture dominicale. La vieille dame se justifie en racontant qu’elle s’est déplacée pour le vote à la primaire de droite, dans un bureau situé à proximité du Leclerc. Parmi les manifestants présents ce dimanche matin, un jeune homme, Mathias, explique sa démarche. « Le patron de cette grande surface ne gagnera pas plus d’argent avec cette décision. Je peux comprendre que l’on autorise le travail dominical pour des professions de santé, de sécurité ou de transport. Mais en quoi la possibilité de faire ses courses le dimanche matin est-elle un besoin vital ? D’autant plus que le marché et les petits artisans sont accessibles. Le dimanche est fait pour se reposer. Mais il faut croire qu’aujourd’hui, pour les petits travailleurs, cela n’est pas autorisé ».

Un peu plus tôt dans la matinée, alors que les manifestants posaient leurs tracts sur les caddies du supermarché, Brice Saint Laurent, le directeur des magasins de Tarbes Ormeau et de Lourdes est venu vers eux. L’occasion d’un échange surréaliste avec Marie-Jo, l’une des opposantes au travail dominical. « Vous êtes ici chez moi, dans un domaine privé », lance le directeur. « J’habite un petit appartement dans la cité proche, je suis aussi un peu chez moi », répond la manifestante. Elle lance au directeur : « puisque vous ouvrez votre magasin juste sous mes fenêtres le dimanche matin, je vous propose d’échanger mon petit appartement avec votre villa à la campagne, pour que je puisse m’y reposer ». Et le directeur lui répond : « il est vrai que le dimanche est le jour du Seigneur ! » avant de s’éloigner. Brice Saint Laurent explique ensuite à deux autres manifestants : « cette ouverture dominicale est un test. Nous souhaitons nous adapter aux nouvelles habitudes de consommation des clients. Plusieurs autres grandes surfaces de l’agglomération tarbaise ouvrent déjà depuis 5 ans le dimanche matin. Cela fait trois ans que nous réfléchissons nous-mêmes à ce projet. Si cela ne marche pas, nous arrêterons cette expérience ».

Un militant de la CGT distribue un tract qui énumère les conséquences de l’ouverture dominicale des grandes surfaces. « On oblige surtout des femmes à sacrifier leur dimanche, leurs enfants, leurs familles, leurs loisirs. On remet en cause le repos dominical pour tous, si précieux pour la société, acquis de haute lutte par les travailleurs depuis 1906. C’est notre droit à tous de le conserver. Alors, un geste qui peut arrêter cette destruction progressive de la société : abstenez-vous de faire vos courses le dimanche. Organisez-vous les six autres jours de la semaine ». De son côté, le collectif « Nuit Debout », dans un texte intitulé : « Et pourquoi pas la nuit ? », en appelle à la responsabilité des clients. « Nous sommes libres de notre mode de consommation. Mais notre façon de consommer détériore les conditions de vie des employés du commerce. Nuit Debout Tarbes attire l’attention des clients sur les alternatives plus respectueuses, tant au niveau social qu’environnemental. En privilégiant les circuits courts, nous développerons l’économie locale et préserverons le commerce de proximité ». A l’extérieur du Leclerc Ormeau de Tarbes, sur l’une des aires de rangement des caddies, une affiche résume avec humour le sentiment des opposants au travail dominical : « le dimanche, c’est grass’mat’ ! ».

Jean-François Courtille

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