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Le mouvement citoyen « Nuit Debout » s’installe

samedi 23 avril 2016 par Rédaction

Le mouvement citoyen « Nuit Debout » s’installe peu à peu dans le paysage de la cité bigourdane. Vendredi soir, 70 personnes se sont retrouvées pour dialoguer sur la place de l’Hôtel de Ville. Un début d’organisation s’est mis en place, avec la constitution de commissions. Et des jeunes ont partagé une ratatouille savoureuse, confectionnée à partir d’aliments encore consommables collectés dans les rebuts d’une grande surface !

« Plusieurs personnes qui rêvent dans leur coin, cela s’appelle une utopie. Plusieurs personnes qui aspirent au même rêve, cela s’appelle une réalité. Nous sommes cette réalité ». Guillaume est l’un des nombreux jeunes adultes qui ont participé vendredi soir, sur la place de l’Hôtel de Ville de Tarbes, à la deuxième « Nuit Debout » des Hautes-Pyrénées. Une rencontre qui a réuni cette fois jusqu’à 70 personnes, de toutes générations, au pic d’affluence de la soirée. « Nous avions peur que les gens soient dissuadés de venir car la météo avait annoncé de la pluie. Mais finalement, nous avons quand même pu tenir notre deuxième assemblée générale », se réjouit Géraldine, l’une des chevilles ouvrières du mouvement. Au cours de cette deuxième soirée, la « Nuit Debout » tarbaise a amorcé un début d’organisation. Une commission pour réfléchir à un projet de « constituante » va se mettre en place, sur le modèle de ce qui a déjà été expérimenté par la « Nuit Debout » toulousaine. Morgane, une jeune anthropologue politologue, a aussi évoqué les débats d’enjeu local, tels que la mobilisation contre le projet de déchetterie à Bordères-sur-l’Echez. Une autre commission, plus pragmatique, va élaborer une banderole de la « Nuit Debout » pour la manifestation du 28 avril dans les rues de Tarbes. Et les participants ont déjà fixé un troisième rendez-vous, toujours devant l’Hôtel de Ville, vendredi 29 avril à 19h. « Nous espérons que monsieur le Maire viendra nous rendre visite », plaisante Christine, qui arbore un joli béret. « Ce qui m’intéresse dans la démarche des « Nuits Debout », c’est de voir la parole donnée à chaque personne. Je trouve que le monde politique est grangrené par l’argent. Nous évoquons dans cette assemblée un possible changement constitutionnel. Va-t-on enfin réussir à faire bouger les choses ? ».

Stéphane, de son côté, est « touché de découvrir ce rassemblement, ce mouvement, en train d’émerger. C’est l’espoir de voir enfin quelque chose de concret se dessiner. Je sens bien que beaucoup de gens en ont marre de la situation actuelle ». Un autre jeune, Morgan, participe à sa première « Nuit Debout », « en observateur, plus qu’en contributeur, mais avec enthousiasme ». Il se dit satisfait de constater « une volonté d’agir sur le fond et sur le plan systémique, pas seulement par rapport à des problèmes ponctuels ». Et il se réjouit de voir « les citoyens s’approprier l’espace public de cette manière-là ». Sam, musicien, propose d’enrichir la « Nuit Debout » de Tarbes par des concerts et des spectacles « qui mêleront le rock et le rap. Ce sera une manière de faire sortir les gens de leurs ghettos, de leur donner aussi la parole, et d’élargir ainsi le cercle de la rencontre ». Sa suggestion devrait être mise au débat le 29 avril.

Géraldine explique d’une voix douce et posée sa motivation pour continuer la démarche des « Nuits Debout ». « Le refus d’être enfermée dans le carcan de la juste parole dogmatique, pratiquée par le milieu politique. La possibilité pour chaque citoyen de prendre la parole de manière libre. Je pense que le mouvement va s’étendre au niveau national. Le film ‘Demain’ de Cyril Dion et Mélanie Laurent a joué un rôle très positif dans la prise de conscience des citoyens ». Manu qualifie avec humour la « Nuit Debout » « d’Objet Démocratique Non Identifié ». Il trouve que la politique « est trop souvent perdue dans les hautes sphères », et que « l’équité de représentation des tendances politiques n’est pas assurée ». Pour le jeune homme, la « Nuit Debout » est un outil qui permet de « redonner du sens au mot ‘citoyenneté’ ».

Guillaume, qui se définit comme « poète », a préparé avec ses amis une table pour partager les aliments collectés dans les rebuts d’une grande surface des Hautes-Pyrénées. « J’ai travaillé autrefois comme cuisinier, et je sais quels aliments restent consommables, même après avoir été jetés par les magasins. C’est comme cela que je me nourris, et je ne suis pas tombé malade depuis des années ». Il a confectionné lui-même une ratatouille savoureuse, au fumet prometteur, dont se régalent les participants. « Aujourd’hui, les gens ont perdu le sens de la gratuité », se désole le jeune homme. « Nous avons voulu partager le fruit de nos collectes, parce que cette nourriture gaspillée appartient à tout le monde ! ».

Dans la nuit fraîche de Tarbes, ce vendredi 22 avril, devant l’Hôtel de Ville doucement illuminé, des femmes et des hommes de tous horizons ont commencé ainsi, paisiblement, à imaginer une autre réalité possible pour l’avenir …

Jean-François Courtille